La conférence sur le climat de paris a enfin débouché sur un accord. Si le bilan est mitigé, on peut d’ores et déjà tirer quelques enseignements pour l’avenir. Notamment la marque d’une volonté internationale d’aller dans le bon sens, mais aussi des échéances un peu trop lointaines.

C’est à souligner, presque tous les États de la planète se sont mis d’accord pour lutter contre le changement climatique. Que le Tuvalu et l’Arabie saoudite signent le même texte, que la Chine et les États-Unis s’engagent à travailler main dans la main, que les pays riches comme pauvres, pollueurs comme victimes, dégagent un objectif commun est évidemment en soi une formidable réussite pour cette COP21. Reste que la société civile peut tout de même lui faire quelques reproches. Et notamment son calendrier, pas vraiment à la hauteur de la situation d’urgence décrite par la majorité des États.

Le texte de l'accord est disponible ici.

2016

L’accord n’est pas valable dès aujourd’hui. Il faudra attendre le 22 avril 2016 et sa signature par les 55 États représentants au moins 55% des émissions de gaz à effet de serre. Ces derniers auront un an à partir de cette date pour signer et ratifier le traité. En 2016, aura également lieu la COP 22, à Marrakech. Pour l’heure, difficile de dégager les objectifs et ambitions de cette prochaine conférence, si ce n’est qu’elle devra s’inscrire dans la continuité de celle de Paris et permettra de s’assurer du respect des engagements pris lors de cette dernière.

C’est dans cette optique qu’en 2018, un « dialogue de facilitation entre les parties » pour faire le point sur les efforts collectifs sera mis en place. Les premières observations des efforts faits (ou plutôt « à faire ») pour limiter le réchauffement climatique n’auront donc lieu que dans trois ans.

2020

Une fois signé et ratifié, l’accord ne sera mis en œuvre qu’après 2020. Les engagements ayant suscité le plus de remous, notamment l’aide de 100 milliards de dollars du Nord au Sud, n’entreront donc en vigueur qu’à ce moment là. Toutefois, alors que ce point semblait poser plusieurs problèmes (accord des pays du Nord sur la somme à verser, modalités d’aides, désignation des bénéficiaires prioritaires, etc.), ce fond vert pourrait dépasser les espérances des pays du Sud puisque le texte annonce que ces 100 milliards sont « un plancher, amené à être rehaussé d’ici 2025 ».

Deuxième point crucial : les engagements pris par les entreprises. Nous devrions observer un doublement de la recherche et du développement (R&D) verts d’ici 2020 dans les 20 pays qui représentent 80 % des dépenses de R&D (principalement Chine, États-Unis et pays européens). Si ce point est bien respecté, les pays industrialisés (et donc les plus pollueurs) seront donc parfaitement « équipés » à horizon 2020 pour lutter efficacement et technologiquement contre le réchauffement climatique.

2023

Le premier « bilan mondial » aura donc lieu en 2023. Il sera ensuite effectué tous les cinq ans. Il devra rendre compte de l’effet réel et global des contributions des États sur le climat. Si Laurent Fabius a noté que toute avancée significative pourrait être signalée avant, il y a fort à parier que nous attendions donc huit ans avant le premier retour sur cet accord.

À noter également, l’accord prévoit qu’à partir de cette date, tout État pourra se retirer du traité de manière unilatérale. Espérons donc que la bonne volonté affichée à Paris ne soit pas qu’un feu de paille, on se souvient notamment qu’en 2011 le Canada avait bruyamment quitté le protocole de Kyoto sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

2025

C’est en 2025 que tout s’accélère. Et c’est là la principale critique faite à cet accord. Les ONG, notamment, estiment que cette date est trop lointaine, et que l’accord aurait pu (dû) être plus ambitieux avant cette date, en raison de l’urgence de la situation. « Les 15 prochaines années sont décisives pour rester sous 2°C selon le Giec (Groupement international d’experts du climat), donc 2025 c’est trop tard« , souligne Pascal Canfin.

Toutefois, l’accord spécifie qu’à partir de 2025 les objectifs devront être revus à la hausse. Et que tous les cinq ans, des objectifs de plus en plus ambitieux devront être respectés. L’idée est donc de « rattraper le retard » puisque l’on sait désormais qu’avec les contributions actuelles, les États ne pourront empêcher une hausse du climat mondial de 3° d’ici 2100.

2050

Le texte ne dépasse pas les échéances liées à 2030. Toutefois le GIEC est largement mentionné dans cet accord et sera de nouveau consulté. Or ce dernier juge « impérative » une baisse de 40 à 70 % des émissions d’ici 2050, pour parvenir à la neutralité carbone à la fin du siècle. Les prochaines COP devront donc aller dans ce sens.

D’autre part, pour limiter la hausse à 2°, le secteur de l’énergie devra atteindre au moins 50% de renouvelable d’ici 2050, ce qui représente au moins 36 000 milliards de dollars supplémentaires d’investissements, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Dans le même temps, l’Organisation mondiale du travail estime que cela pourrait générer la création de 60 millions d’emplois. Problème : aucun objectif chiffré sur la transition énergétique ne ressort du traité, au grand dam des ONG.

De même, l’accord indique qu’il faut réfléchir à la nécessité d’établir une tarification du carbone. Mais alors qu’une première étape en ce sens et un agenda à horizon 2050 était attendu, rien de concret n’a été établi.

2100

L’accord prévoit de maintenir le réchauffement climatique en dessous des 2° symboliques d’ici la fin du siècle. Et si possible 1,5°. C’est le cœur de l’accord de Paris. Celui-ci est plus ambitieux que l’objectif initial de la COP21, qui visait à contenir le réchauffement sous le seuil de 2°. Il prévoit de le maintenir « bien en dessous de 2° par rapport aux niveaux préindustriels » et de « poursuivre les efforts pour limiter la hausse des températures à 1,5° », ce qui « réduirait significativement les risques et impacts du changement climatique ».

En l’état actuel des émissions mondiales de gaz à effet de serre, le plafond de 1,5°est irréaliste, sa mention, demandée par les petits États insulaires menacés de submersion, ayant surtout une portée symbolique et politique.

Et cela résume bien l’accord de Paris. Avant cette COP21, il était inenvisageable d’évoquer ce chiffre, d’inscrire noir sur blanc des objectifs liés à la transition énergétique ou de pointer du doigt dans un traité international les responsabilités du traitement des énergies fossiles. Et si cet accord est encore perfectible et devra être révisé durant les prochaines COP, il aura au moins permis d’établir une feuille de route commune pour la fin de notre siècle.

Infographie : Agence France Presse

COP21, et maintenant ?

Category: Environnement
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